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17 octobre 2011 1 17 /10 /octobre /2011 18:36

01070660463.gifEnfance obscure de Pierre Péju 
éditions Gallimard _ collection "Haute enfance"

« L’opacité matinale du monde est aussi la promesse que tant de choses qu’il ignore finiront par prendre formes et couleurs. Avec lenteur. Avec le Temps, l’inépuisable Temps qu’un enfant croit avoir devant lui. »

Dans cet essai, le philosophe et romancier isérois s’intéresse à l’Enfantin. À ne pas confondre avec « souvenirs d’enfance », ce concept que Pierre Péju dessine est aussi fugace qu’un instant de conscience. L’Enfantin est souvent lié à des peurs, des hontes et à des expériences originelles, mais aussi à un Ailleurs, à un Au-delà qui lui octroie une certaine universalité.


Résultant en actes et se révélant dans la création artistique mais aussi littéraire, Pierre Péju nous livre dans cet essai diverses incarnations de l’Enfantin dans la littérature, citant notamment Nathalie Sarraute, Victor Hugo, Franz Kafka, Vladimir Nabokov, Marcel Proust, ou encore l’Enfance berlinoise du philosophe, historien d’art et critique littéraire, Walter Benjamin.

Si l’enfant a longtemps était méprisé par les philosophes, la modernité qui le revalorise (voire le survalorise) a ouvert une nouvelle dimension aux réflexions qui le concernent. Pierre Péju fait ainsi état de cette évolution, évoquant différentes conceptions de l’enfant de Kant à Sartre en passant par Rousseau dont il dit que Les confessions « demeurent comme un monument et comme un repère sur le long chemin de la production moderne de l’Enfantin ».

D’une langue accessible, cet essai puise une force indéniable dans les nombreuses anecdotes et récits de souvenirs de son auteur qui mêle sincérité et poésie à la réflexion philosophique. 


EXTRAIT :

" Si je choisis de faire le récit d'une très lointaine anecdote, c'est pour tenter d'en révéler le "noyau d'enfance". Noyau plus dur, plus secret, mais aussi parfois plus menaçant que ce temps puéril que l'on se croit capable de restituer. Car l'Enfantin n'est jamais séparable d'une menace, de l'expérience originelle d'une peur, d'une honte ou d'un enchantement. De recoins sombres d'où la monstruosité, croit-on, va surgir. Mais aussi de recoins protecteurs et chauds, de cachettes, de territoires où vivent des bêtes. Terreur du vaste extérieur et réconfort primitif procuré par le rougeoiement des flammes.... La peur, dans mon récit, n'est pas uniquement celle de "l'homme assis dans le noir". Le spectre principal - que je le nomme Enfantin ou, pourquoi pas ? "enfantôme" - consiste en une impression très simple d'ombre et de lumière jointe au poids, que je sens encore, certains jours, au bout de mon bras, de la lourde lampe torche dont j'avais tant de mal à faire jaillir le pinceau lumineux. Ma lutte avec les ténèbres était si douloureuse physiquement qu'elle subsiste encore, tant d'années plus tard, dans la mémoire de mes phalanges, la paume de ma main, dans mes nerfs et mes muscles, et, bien sûr, dans la crainte archaïque et confuse, qui ne m'a jamais vraiment quitté, de "ne plus rien y voir"!" 


 Pierre Péju est l’auteur de romans, notamment de La Petite Chartreuse (2002), du Rire de l’ogre (2005) ou de La Diagonale du Vide (2009) parus chez Gallimard, de Marée basse : méditation sur le rivage, sur ce qu’on y trouve et sur le temps sans emploi paru aux éditions Jérôme Million (2009),
d’essais dont La Petite fille dans la forêt des contes (Robert Laffont, 1981 et 1997), L’archipel des contes (Aubier, 1989) ou Lignes de vie, Récit et existence chez les romantiques allemands (José Corti, 2000). 
Pierre Péju écrit également chaque mois la chronique « Question d’enfance » dans la revue Philosophie magazine

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commentaires

E
Comme un journal intime... trop intime pour que le partage fonctionne . vraiment. j'aime mieux les romans de Pierre Péju
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